Chants de l'Escalade
Au lendemain de l’Escalade, les murs de la Cité de Calvin furent placardés de chants relatant les événements de la nuit. L’importance de cet événement se mesura à l’impact qu’il eut sur l’histoire et les traces laissées dans les chroniques de l’époque et futures.
De mémoire genevoise, aucun événement ne marqua autant le peuple qui fut consciente que son destin était en jeu. Dès lors, des citoyens de toute condition sociale et éducation produisirent un nombre important de récits, actes ou chansons.
Les premiers chants ont d’abord inspiré des cantiques spirituels, un genre musical important à la Réforme. Dès le 12 décembre 1602, des chansons furent imprimées et ce jusqu’au XVIIIe siècle; la majorité d’entre elles nous sont parvenues grâces aux nombreuses copies que conservaient le peuple.
Il n’est pas étonnant de reconnaître des airs connus, la reprise de mélodies étant choses courantes autrefois, à l’instar des parodies de nos jours.
Plus de 150 chansons ont été recensées pour la période de 1602 à 1860 environ (Les Chansons de l’Escalade, Jean-Daniel Candaux)!
Le recueil « Chansons de l’Escalade » (Julien & Fils, Genève 1845) en présente 24; nous décriront ci-dessous les plus connues:
Cé qu’é lainô
Composé peu avant le 18 décembre 1602 par plusieurs auteurs (vraisemblablement des étudiants) après l’attaque du duc de Savoie contre la ville, il est rédigé en arpitan* genevois, son titre signifiant en français «Celui qui est en haut»; la mélodie est très proche du thème du… «God save the Queen».
* patois également appelé franco-provençal, parlé dans le Duché de Savoie et les régions limitrophes dont Genève faisait partie.
1
Cé qu’è lainô, le Maitre dé bataille,
Que se moqué et se ri dé canaille,
A bin fai vi, pè on desande nai,
Qu’il étivé Patron dé Genevoi.
2
I son vegnu le doze de dessanbro,
Pè onna nai asse naire que d’ancro;
Y étivé l’an mil si san et dou,
Qu’i veniron parla ou pou troi tou.
68
Dedian sa man il y tin la victoire,
A lui solet en démure la gloire.
A to zamai son Sain Non sai begni!
Amen, amen, ainsi, ainsi soit-y!
La Vieille chanson
La Vieille chanson, chantée sur l’«air du Mirliton» datant de 1700-1750.
Charles Pesson, Vieille chanson in Recueil de l’Escalade, 1954. Recueil édité par la Compagnie de 1602, Genève. p. 108.
1
Par une nuit bien froide et sombre,
C’était en mil six cent et deux,
Les Savoyards en grand nombre,
Commandés par Brunaulieu,
S’en vinrent pour pour prendre la vieille Genève,
Qui dormait bien fort des deux yeux.
2
Dans les fossés, Père Alexandre,
Encourageait les plus peureux,
Qui par ce soir de décembre
Grelotaient à qui mieux mieux,
Et n’osaient point prendre la vieille Genève,
Qui dormait bien fort des deux yeux.
Ah! La belle Escalade
1
Allons, citoyens, de grand cœur, (bis)
Réveillons ici notre ardeur, (bis)
Pour chanter les exploits
Des vaillants Genevois
Du temps de l’Escalade,
Savoyard, Savoyard,
Du temps de l’Escalade,
Savoyard, gard, gard.
2
Ce fut l’an mil six cent et deux, (bis)
Qu’on vit ces Savoyards furieux, (bis)
Dans l’ombre de la nuit
Violer notre réduit
Ah! la belle Escalade,
Savoyard, Savoyard,
Ah! la belle Escalade,
Savoyard, gard, gard.
Psaume CXXIV
Sans le Seigneur qui nous a protégés
Comme il a fait, jadis, en leurs dangers,
Nos grands aïeux combattant pour la foi:
Sans le Seigneur qui nous a protégés,
Que pouvions-nous, faibles et pleins d’effroi?